mercredi 19 septembre 2018

Le donjon de la Société Générale

La parenté de cet article revient à un lecteur qui m'interrogeait sur l'espèce de cocotte-minute vue sur cette carte postale:


Nous y voyons la place du Trocadéro avec son palais qui disparaîtra en 1937 pour laisser la place au Palais de Chaillot et, au premier plan, la grosse structure circulaire en question.

Un peu d'histoire:
Jusqu'à la loi du 30 décembre 1981, les actions, les parts de sociétés et les obligations se présentaient sous la forme de titres en papier. La preuve de propriété d'une valeur mobilière résultait de la simple détention d'un document. 


Les gros actionnaires détenaient ainsi des tonnes (littéralement) de papier dont on connait la vulnérabilité au vol, au feu ou à l'eau.
Après la grande inondation de 1910, la Société Générale qui avait failli voir ses archives réduites à néant, décida d'acquérir des terrains en zone non inondable où elle pourrait édifier un centre d'archives et de conservation de titres plus sûr.
Son choix se porta sur un grand triangle délimité par les avenues Kléber et Malakoff (aujourd'hui Poincaré) et par la rue de Longchamp. Ce terrain abritait auparavant des écuries de la CGO (Cie générale des Omnibus).
Aussitôt la banque engagea de grands travaux: l'ensemble "Trocadéro" était achevé en 1914.


Cette vue aérienne de 1949 nous montre le triangle du bâtiment Trocadéro:


D'une hauteur de 34 mètres, d'un diamètre extérieur de 50 mètres, la tour est constituée de deux murailles circulaires en béton armé. À 15 mètres sous terre, un mur circulaire de maçonnerie, doublé d’un chemin de ronde creusé dans le roc, est édifié à l’aplomb des murailles, de façon à consolider la structure et à isoler le sous-sol des galeries d’anciennes carrières creusées aux alentours. Tout travail de sape s’avère impossible. Le pourtour de l’édifice est inondé, de sorte qu’une barrière naturelle supplémentaire le rend impénétrable.





L'évolution des techniques verra la tour équipée des protections les plus modernes (radars, etc...).
À la suite de la dématérialisation des titres, la tour sera utilisée comme coffre-fort géant, abritant des œuvres d'art, des bijoux ou des meubles sous le nom de Sogégarde.
L'immeuble sera vendu en 1987 et la tour sera détruite afin de réaliser une opération immobilière.


De l'extérieur on ne voit pas la différence. C'est un centre d'affaires qui occupe les lieux aujourd'hui.
Mais en sous-sol, nous trouvons la trace de notre donjon comme le montre cet extrait du plan des carrières (Merci Yann !):




Seul souvenir du passé, une petite agence à l'angle de la rue de Longchamp porte encore les couleurs de la Société Générale:


112 avenue Kléber, Paris XVI°.

7 commentaires:

Hervé a dit…

Intérieurement les zones de circulation sont très intéressantes. Côté bureau, les volumes semblent généreux. Dommage que cet édifice ne soit pas resté debout.

le grand barde a dit…

Le grand barde vous fait remarquer que la scoumoune a souvent frappé la Société Générale
1 ) premier hold up automobile par Bonnet et sa bande
2) casse du siècle par Spaggiarri
3) escroquerie du millénaire par Kerviel

au moins les inondations et invasions de sauterelles ne la frapperont pas

JPD a dit…

Votre liste scoumounesque serait complète si vous aviez ajouté qu'un certain JPD y a travaillé il y a fort longtemps !

PS: La fameuse bande à Bonnet !!! (je pouffe)

le grand barde a dit…

la bande à Bonnet a existé , elle tire son nom du préfet de Corse qui n'avait rien trouvé de mieux que donner l'ordre à ses gendarmes de mettre le feu à une paillote construite illégalement sur le domaine maritime dans l'ile de beauté
les pandores ont si bien exécuté leur mission que l'un d'eux fut brulé et hospitalisé

Anonyme a dit…

Incroyable! Un grand merci pour cet article.
Et vraiment dommage que ça n'ait pas été conservé

Yann a dit…

On en voit encore la trace sur les plans des carrières
https://www.dropbox.com/s/odgnhvnbii8ncga/trocadero.jpg?dl=0

JPD a dit…

Merci de l'info. Je vais ajouter ça sur l'article !