lundi 30 janvier 2023

Hôtel de Lauzun (6)

 Nous poursuivons notre visite de ce trésor de l'île Saint-Louis.

Rappel: pour voir l'ensemble des articles consacrés à cet hôtel, cliquez sur le libellé Hôtel de Lauzun.

Les cinq articles précédents vous ont montré les plus belles pièces de l'hôtel de Lauzun, celles qui sont accessibles au public lors des trop rares fois où les portes s'ouvrent. Ce sixième chapitre est consacré aux espaces fermés à la visite.

Vous vous rappelez le salon de musique avec ses deux balcons ?


Et bien grimpons-y !


Caché entre les deux balcons mais invisible d'en bas, le clavier de l'orgue Mutin Cavaillé-Coll.
L'orgue a été réalisé en 1906 pour le baron Louis Pichon, alors propriétaire de l'hôtel.


Les tuyaux d'orgue sont bien cachés dans le buffet:



Si vous croyez que c'est facile de rentrer un gros objectif dans un petit buffet !


Au cours de nos déambulations, vous ne l'avez peut-être pas remarqué mais des tests de peinture sont en cours en différents endroits. Gageons que c'est l'annonce de futurs travaux de nettoyage...





Vu de dessous, un plafond "à l'italienne" comme celui du salon de musique c'est bien joli, mais vu de dessus c'est comment ?


Et voilà, il suffit de se glisser par une petite ouverture et on découvre le dessus de la coupole. Celle-ci a été renforcée par des poutres métalliques. 



Dans le couloir menant à l'appartement de Baudelaire, nous tombons sur deux moteurs d'orgue; le premier à gauche date de 1904, année de l'installation de l'orgue. Il a été remplacé par celui de droite.


Baudelaire à l'hôtel de Lauzun ?

En 1843, agé de 23 ans, il s'installe dans un petit appartement (3 pièces) sous les combles de l'hôtel.

C'est là qu'il connaîtra les "Paradis artificiels" au cours des séances organisée par le célèbre club des Haschichins. Ce club, formé par Baudelaire, Théophile Gautier et le docteur Moreau de Tour verra de nombreux hommes de lettres, artistes et scientifiques se réunir pour "étudier la relation entre haschich et création artistique"...

Mais Baudelaire ne reste que deux ans à l'hôtel de Lauzun. Criblé de dettes et après une tentative de suicide, il retourne chez sa mère place Vendôme à l'automne 1845.

Ne reste de lui que le surnom de cet escalier de service qui permettait au poète et à ses invités d'accéder directement aux combles depuis l'entrée cochère:


Après l'escalier Baudelaire, les pièces de son ancien appartement sont aujourd'hui occupées par les bureaux de l'Institut d'études avancées (I.E.A.).




Ce coffret se trouvait jadis dans toutes les bonnes maisons, à l'office, pour appeler les domestiques:


Nous avons vu précédemment que le grand escalier d'honneur avait été un temps entresolé. C'est cet escalier qui faisait alors office d'escalier principal:




Le baron Jérôme Pichon n'est que le neuvième ou dixième propriétaire de l'hôtel de Lauzun qu'il achète en 1842.


Cet homme de goût - collectionneur d'art - fit réaliser un certain nombre d'aménagements dans l'hôtel dont ce cabinet de toilette entièrement lambrissé:




Adjacente au cabinet de toilette, une salle de bain tout en marbre... 
qui sert aujourd'hui de débarras !

 



Toujours de l'ère Pichon, ce superbe cabinet tout en boiseries nommé sobrement "salon de l'aile en retour"...




Même le tableau électrique est d'époque !


Nous ne serions pas complets si nous n'allions pas visiter les sous-sols !


Tiens, des carreaux blancs du métro !


N'est-il pas dommage que les tapisseries qui jadis ornaient le grand escalier ou la salle d'armes soient réduites à dormir dans une cave ?


"Maçonnerie à démolir en cas d'accident"... Cette inscription d'avant-guerre est assez courante dans Paris. Elle signalait l'accès à un couloir muré communiquant avec l'immeuble voisin. Mais ce couloir n'étant muré qu'avec des parpaings creux, il était facile de donner quelques coups de pioche pour s'échapper si l'immeuble au-dessus s'était effondré. Une sortie de secours en quelque sorte !


Admirez cette magnifique salle de réunion... interdite aux claustrophobes !


Après cette visite complète, on ne peut que reconnaître que les travaux entrepris par la ville de Paris pour moderniser cet hôtel sans le dénaturer (à part les grilles) sont dignes d'éloges. L'implantation d'un institut comme l'IEA fait vivre le bâtiment (chauffage, aération) sans pour autant en faire une ZAD, tant mieux !
Il est temps à présent d'emprunter un des quatre escaliers (vous ai-je dit que j'aimais les escaliers ?) pour regagner la grande ville.  


Ces visites doivent tout au remarquable ouvrage de Raymond Boulhares "l'hôtel de Lauzun, trésor de l'Île Saint Louis", qui vient de rentrer dans la bibliothèque de Paris Bise Art.
Cet ouvrage, détaillé, complet avec des plans précis des différents étages de l'hôtel et de magnifiques photos peut se commander sans difficultés sur le net.
Raymond Boulhares a vécu 42 ans dans cet hôtel particulier du XVIIe. C'est en 1970 que son père, employé de la direction des affaires culturelles de la Ville, est nommé gardien de l'hôtel où il emménage avec sa famille. Pour Raymond qui n'a que dix ans, c'est la révélation. Après avoir plusieurs fois remplacé son père, Raymond Boulhares lui succède en 1998 en tant qu'agent logistique général de la Ville.  Parti en retraite, son fils Christopher a pris le relais et travaille aussi dans ce lieu magique. Bon sang ne saurait mentir.
Raymond Boulhares, fort de ses connaissances sur l'hôtel, a eu l'excellente idée de ce livre rédigé en collaboration avec un professeur d'histoire de l'art. Il a en projet un livre sur l'Ile Saint Louis.


Aucune visite possible pour l'instant, mais la ville de Paris réfléchit à rouvrir l'hôtel à la visite.

17 quai d'Anjou, Paris IV°.

2 commentaires:

  1. remarquable reportage. Pour info, la coupole qui cache le plafond avec la peinture (le triomphe ou ma toilette de Venus) s'appelle un extrados, les charpentes métalliques sont de 1910. Les Pichon qui habitaient cet hôtel de 1842 jusqu'à l'achat par la Ville dans les années 20 ont magnifiquement oeuvré pour l'hôtel.
    L'escalier dit de Pimodan ( bel escalier louis 16) fut l'escalier d'honneur pendant près d'un siècle jusqu'à la reconstruction du grand escalier au milieu du 20ème siècle

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  2. Zut, la fin est décevante !

    On se dit : JPD nous fait saliver et à la fin "aucune visite possible" ! :-(

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